L'innocence est l'aboutissement de l'enfance face aux incertitudes d'un monde adulte..Ne l'oublions pas!
Saleté de vieille ville.
Où sont passées, en France, les complexes industriels, les jardins ouvriers, les eldorados communautaires, toute cette résilience légendaire, désormais silencieuse?
Les belles paroles, les lois et les réformes, les projets d’aménagement, les spéculations foncières ont précipité le destin des travailleurs sur des chemins plus ou moins hasardeux. Les vieux bâtiments, autrefois dédiés à la production, à la fabrication, se sont transformés progressivement en citadelles consuméristes ou ont, tout simplement, été rasés.
Comment imaginer que d’anciens bastions du plein emploi soient devenus des pompes à fric, des vitrines de mode, des miroirs à pigeons?
Les explications hantent certainement les urnes, qu’elles soient électorales ou funéraires. Chacun aspire au confort, cherchant son trèfle à quatre feuilles comme porte-bonheur. Mais le jargon des fleurs n’est pas officiellement la langue au paradis.
Que d’énergie gaspillée pour une couronne de laurier, un brin de muguet, d’immortelles pensées.
Planter de la sauge au jardin, c’est déjà résister à l’ordonnance du médecin.
Dakar la belle et sa verte presqu’île se confondent peu à peu dans les larmes grises de béton. Les tentacules d’une pieuvre géante et sournoise se répandent sur tout son territoire. L’émergence d’une capitale a un prix. L’environnement sacrifié et la pollution galopante sont malheureusement de vilaines factures.
Angelo aime sa baie de N’Gor, bénie jadis par les dieux. Il rêve de sentiers de douaniers, d’alternatives aux pots d’échappement du boulevard, quelques kilomètres aménagés sur des rochers sécurisés et bien fréquentés. Le littoral est un bien commun, pas un dépotoir de plein air, ni la poubelle aux incivilités. Avec peu de moyens et beaucoup de volonté, on sait suspendre des passerelles pour aider l’humanité à mieux respirer. Quitte à vivre les uns sur les autres, pourquoi se priver d’espaces protégés. Une autre façon de se déplacer, de prendre du bon temps, au terme d’une balade vivifiante, d’une baignade tonifiante, d’une restauration raisonnable. Un itinéraire pour piétons responsables, un parcours de santé loin de la jungle automobile et immobilière.
En résumé, il suffit d’offrir le littoral et quelques transversales d’accès, pour voir reculer le spectre de l’asphyxie. Tout n’est pas encore bétonné, les derniers poumons verts, survivants de la presqu’île, sont là pour nous le rappeler. A nous d’en faire des stations d’oxygène et de flécher le tout en direction du bon sens. L’utopie n’est pas un vain mot tant qu’elle suscite une espérance de vie bien plus saine.
Flâner le long d’une coulée verte odoriférante ou patauger entre les sentines nauséabondes et ses chantiers environnants?
Il y a matière à creuser, à réfléchir et surtout à prévoir face aux priorités humaines, devant la montée des eaux. La Terre se défend comme elle peut.
De gros gisements de gaz et de pétrole affolent aujourd’hui les marchés internationaux. Le Sénégal rural ou citadin n’est pas à l’abri des surprises. Une bombe providentielle au service du développement vient d’éclater au grand jour. La nation toute entière entrevoit de belles perspectives d’avenir, les multinationales de l’énergie sont déjà sur les starting-blocks, le Président et son gouvernement ont de lourdes responsabilités. Le peuple, spectateur attentif mais déterminé, espère tirer ses marrons du feu et vivre dignement au pays.
Cela devrait en somme calmer tous les esprits. L’Occident serait ravi de voir baisser une immigration aux frontières et le Sénégal pourrait enfin devenir un modèle de prospérité, un exemple à suivre en matière d’émergence.
Le besoin de partage n’a jamais cessé de briller dans le cœur d’Angelo. Maintenant qu’il est au crépuscule de sa vie, il rêve d’en faire une vertu.
Pendant vingt ans, l’océan, le vent, le sable et le soleil l’ont instruit. A l’école de la patience, la sagesse est sans doute sa plus noble récompense. Vivre est un droit planétaire, respecter un devoir majeur. En général, le beau discours se veut philanthrope tant il doit recruter. Mais quand la peur devient un fond de commerce, le misanthrope charge l’étranger de preuves accablantes. Il lui faut absolument un bouc émissaire pour soulager ses péchés. Malgré sa valeur, le mouton noir est souvent pointé d’un doigt accusateur.
De grâce les impatients, laissez le temps à l’animal de glaner sa liberté, de choisir son pré. La culpabilité est un panier de linge sale, propre à chaque humain. Il n’est pas nécessaire de stigmatiser le barda souillé du clandestin, ni la voile poussiéreuse du navire. La saleté est partout, à la barre du tribunal comme au banc des accusés. Sous une noblesse de robe, le cœur se barricade, sur des oripeaux indésirables, le sang et la honte ont suffisamment coulé.
On applaudit l’exploit du marin solitaire et ses sponsors, jamais un radeau de médusés à la dérive. Le comité d’accueil, en tenue militaire ou civile, se veut médiatique mais rien ne transpire, exceptés les commentaires de gens bien intentionnés.
Il faut renvoyer tout ce bas monde vers la case départ, à supposer qu’elle tienne encore debout. La conjoncture actuelle ne permet pas d’accueillir toute la misère du monde. Cet aphorisme, prononcé à des fins de non-recevoir par un nombre grandissant d’individus, affiche le vrai visage de l’ordre mondial et témoigne de son infinie mansuétude.
« Si la misère se résume à une enfance privée de lait maternel, alors vendons à ces gamins notre bon lait en poudre. » s’écrie Papi Nestlé.
Que penser de ces propos, dictés par l’abondance, cette économie courtisane et aveugle qui se vautre dans la crème?
Méfiez-vous, nababs et empereurs, démocrates ou dictateurs, gras du bide et prédateurs.
En période de vaches maigres, le Veau d’or est sérieusement menacé. Un peuple affamé peut déterrer la hache de guerre, descendre dans la rue et trancher dans le lard.
C’est écrit dans la chanson, gravé dans l’histoire.
I’m gonna make me a good sharp axe
Shining steel tempered the fire
I’ll shop you down like an old dead tree
Dirty old town
Dirty old town